La page tournĂ©e du franc CFA en Afrique de l’Ouest
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Avec la fin de 2019, ce n’est pas une page qui se tourne mais une ère qui s’achève en Afrique de l’Ouest. Le 21 dĂ©cembre, Ă l’occasion de la visite officielle du prĂ©sident français Emmanuel Macron en CĂ´te d’Ivoire, le ministre des Finances du BĂ©nin, Romuald Wadagni, prĂ©sident en exercice du Conseil des ministres de l’UEMOA, a signĂ© Ă Abidjan avec le ministre français de l’Economie et des finances, Bruno Lemaire, un nouvel accord de coopĂ©ration monĂ©taire qui remplace celui existant depuis plus de 46 ans : le franc CFA cède la place Ă l’Eco. “On pourrait parler du Brexit de l’Afrique de l’Ouest“, a commentĂ© le 1er janvier l’Ă©minent Financial Times britannique. Et David Pilling dans son article de rappeler que l’acronyme “CFA” signifiait “Colonies françaises d’Afrique”.
“C’est donc bien une Ă©tape historique qui est franchie ici“, a soulignĂ©, Ă Abidjan le 21 dĂ©cembre, Emmanuel Macron lors d’une confĂ©rence de presse commune avec son hĂ´te, le prĂ©sident ivoirien Alassane Ouattara dont, rappelons-le, le mandat s’achève cette annĂ©e.
“C’est aussi en entendant votre jeunesse que j’ai souhaitĂ© Ă vos cĂ´tĂ©s, Monsieur le PrĂ©sident, engager la France dans une rĂ©forme historique et ambitieuse de la coopĂ©ration monĂ©taire entre l’Union Ă©conomique et monĂ©taire ouest-africaine et notre pays. Oui, la question du français CFA cristallise de nombreux dĂ©bats et de nombreuses critiques sur le rĂ´le supposĂ© de la France en Afrique. Et c’est la jeunesse africaine qui la pose”, a dĂ©clarĂ© le chef de l’Etat français. “Alors moi, je n’appartiens pas Ă une gĂ©nĂ©ration qui a connu le colonialisme, beaucoup des jeunes qui nous le reproche ne l’ont pas connu davantage et parfois prĂªtent Ă cette Ă©poque les difficultĂ©s d’aujourd’hui. Donc rompons les amarres, ayons le courage d’avancer, de regarder et de bĂ¢tir ensemble en effet un partenariat dĂ©complexĂ©.“
La nouvelle relation monétaire
Concrètement, le franc CFA dans le cadre de l’Union Ă©conomique et monĂ©taire ouest africaine (Uemoa) qui, rappelons-le, regroupe le BĂ©nin, le Burkina Faso, la CĂ´te d’Ivoire, la GuinĂ©e-Bissau, le Mali, le Niger, le SĂ©nĂ©gal et le Togo, sera remplacĂ© dès cette annĂ©e par l’Eco, est-il confirmĂ©. Mais la paritĂ© fixe avec l’euro (actuellement 1 euro = FCFA 655,96) sera maintenue et garantie par la France.
Ceci s’accompagnera par deux changements techniques “majeurs” : la fin de la centralisation obligatoire auprès de la Banque de France de 50% des rĂ©serves de change de l’Uemoa , en supprimant le mĂ©canisme du compte d’opĂ©rations ; la France ne siègera plus dans aucune des instances techniques de gouvernance de l’Union. “Plus spĂ©cifiquement“, a prĂ©cisĂ© Emmanuel Macron, “elle ne nommera plus de reprĂ©sentants au Conseil d’administration [de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), Ndlr.], au ComitĂ© de politique monĂ©taire de la Banque centrale, ni Ă la Commission bancaire de l’Union“.
Mais, indique le Financial Times, la France nommera un reprĂ©sentant “indĂ©pendant” auprès de la BCEAO et “gèrerait” quotidiennement les rĂ©serves de change.
La garde est donc rĂ©formĂ©e mais rapprochĂ©e. Toutefois, un pas considĂ©rable est franchi par rapport aux exigences du Nigeria dans la mise en place d’une devise unique pour toute la rĂ©gion de la Cedeao : que la monnaie commune soit dĂ©connectĂ©e du TrĂ©sor français. Apparemment, c’est chose faite.