Marché mondial du riz : pas de crise majeure mais une hausse de 30% des prix sur 2023

 Marché mondial du riz : pas de crise majeure mais une hausse de 30% des prix sur 2023

@ CommodAfrica

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La décision de l’Inde fin juillet 2023 de suspendre ses exportations de riz blanc non basmati a provoqué une onde de choc sur le marché mondial du riz. Si les prix ont certes augmenté de 30%, ils n’ont pas flambé. L’interdiction de l’Inde était toute relative tandis que la Chine a joué un rôle de régulateur tandis que la Thaïlande et le Vietnam n’ont pas été trop gourmands. Si sur cette première partie de l’année 2024, les prix mondiaux du riz progressent encore de 10%, ils devraient se contracter au second semestre.

Entretien avec Patricio Mendez del Villar, chercheur au CIRAD, à l’occasion de la publication du Rapport Cyclope 2024. 

On a cru un peu au pire sur le marché mondial du riz à la suite de la décision de l’Inde de suspendre ses exportations de riz non basmati. En fin de compte, pourrait-on dire qu’il y a eu plus de peur que de mal ?

Cela a fait de grosses sueurs. Mais l’interdiction d’exporter de l’Inde a été très relative. Dès le départ, ils ont dit que des exceptions allaient être faites pour les pays dont la sécurité alimentaire dépendait de leur riz. Ils ont commencé à passer des accords de gouvernement à gouvernement et les principaux bénéficiaires ont été les pays africains.

Globalement, il y a eu environ 3 millions de tonnes (Mt) qui ont été ainsi exportées par l’Inde. Depuis le début de l’année, on voit également une reprise des exportations indiennes. Le creux de la vague s’est situé aux mois d’octobre et novembre avec une chute de 50% des volumes par rapport à ce que l’Inde exportait l’année précédente. La nous sommes remontés autour de 75% à ce qu’elle exportait en mars 2023.

L’Inde demeure le premier exportateur mondial de riz en dépit de cette interdiction mais aussi de la taxe de 20% sur le riz étuvé ?

Oui. En 2023, l’Inde a exporté 18 Mt contre 22Mt. Il y a une baisse de 4 Mt mais qui a été en grande partie compensée par les exportations de la Thaïlande et du Vietnam.

La Thaïlande et le Vietnam ont pu reconquérir certains marchés qu’ils avaient perdus par manque de compétitivité par rapport à l’Inde ?

Oui, notamment des marchés africains. Mais cela sera temporaire. C’est pour cela aussi que ces pays n’ont pas fait de la rétention et n’ont pas augmenté exagérément les prix car leur stratégie était de vendre le plus rapidement possible avant le retour de l’Inde.

Ce qui a permis d’éviter une forte hausse des prix du riz ?

Oui. Nous ne sommes pas du tout dans la même situation de 2008 où les prix avaient été multipliés par trois. En 2008, l’Inde avait cessé totalement d’exporté et pendant trois ans tandis que le Thaïlande et le Vietnam ont limité leurs exportations mais sur une période très courte.

Globalement, nous avons eu une augmentation de 30% des prix mondiaux du riz en 2023.

En début d’année 2023, on craignait qu’El Nino diminue les productions de riz en Asie. L’impact a été finalement faible ?

L’offre mondiale a progressé de 0,5% en 2023 et la consommation a moins augmenté. En particulier, la consommation de la Chine a diminué. En 2023, Pékin a diminué de moitié ses importations de riz par rapport à 2022 où elles avaient atteint 6,6 Mt. La Chine a joué un peu un rôle de régulateur en puisant dans ses importants stocks. Cela a compensé la demande très forte des Philippines et le retour de l’Indonésie.

Quelle perspective pour le second semestre 2024 ? Une baisse des prix avec le retour de l’Inde ?

On s’attend effectivement à un retour de l’Inde après les résultats des élections qui sont finalement attendus pour début juin. C’est ce que le marché anticipe. Les opérateurs attendent une baisse des prix pour le second semestre avec le retour de l’Inde mais aussi parce qu’il va y avoir progressivement l’arrivée de la nouvelle récolte asiatique, la principale à partir de septembre.

Quel pronostic  de prix ?

En début d’année, j’estimais que les prix mondiaux du riz en 2024 vont baisser en moyenne de 10% par rapport à 2023. Pour l’instant, nous avons une augmentation de 10% par rapport à 2023.

Mais cette baisse anticipée des prix de 10% en 2024 ne compensera pas la hausse de 30% sur 2023 par apport à 2022.

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